20 - Bernard Croisile « Tout sur la mémoire » aux éditions Odile Jacob

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Cher(e)s ami(e)s de Selfarmonia,

Aujourd’hui, il sera question de la mémoire. Notamment celle requise pour pratiquer l’auto-relaxation respiratoire, que nombre d’entre vous connaissent. Pour les autres, il vous suffira d’aller visiter mon site www.selfarmonia.com à la rubrique éponyme. Pour aborder ce sujet complexe, j’ai choisi de m’appuyer sur le remarquable ouvrage de vulgarisation du neurologue Bernard Croisile « Tout sur la mémoire » paru aux éditions Odile Jacob.

Dans son avant-propos, Bernard Croisile définit ainsi la mémoire : 

« Schématiquement, on peut dire qu’elle représente l’ensemble des processus cérébraux permettant d’apprendre une nouvelle information, de la conserver le plus longtemps possible et de la retrouver au moment souhaité. Cette information provient aussi bien de l’extérieur que de l’intérieur. Le monde extérieur nous inonde d’informations sensorielles, tandis que notre monde intérieur nous fournit des signaux fondamentaux sur les variations de notre milieu interne, nos instincts ou nos sentiments. Qu’ils soient externes ou internes, tous ces signaux sont conservés sous forme de traces mnésiques plus ou moins élaborées, plus ou moins solides, plus ou moins faciles à retrouver, plus ou moins fidèles à l’information d’origine. (…) Au plan de son fonctionnement, elle n’est pas unitaire. Pour le dire autrement, LA mémoire n’existe pas : en réalité, différents processus et systèmes de mémoire interviennent selon la modalité de la perception des informations, la chronologie de l’apprentissage, la nature des stocks constitués ou encore le processus de récupération utilisé. »

Ceci étant posé, commençons par le commencement : quel est le mode de fonctionnement de la mémoire corporelle au début de notre vie ? :

 « Dès le premier jour, un bébé retient (…) Comment le prouver ? En étudiant la succion du nourrisson ou l’orientation de son regard. » Mais contrairement à ce qu’on pourrait penser « (…) La mémoire  d’un nourrisson n’est pas uniquement sensorielle ; elle est également motrice. Un bébé maîtrise progressivement et définitivement des gestes sophistiqués tels que la préhension fine, l’équilibre du corps puis la marche, l’articulation des sons produits avec sa langue et encore plus capital, la manipulation d’objets qui permettent moins de jouer que d’explorer le monde à sa portée ! L’utilisation répétée quasi ritualisée d’un jouet permet aux enfants de maîtriser un geste, de se rassurer par la réussite du geste accompli et de s’adapter à leur environnement. »

Et qu’en est-il justement de cette répétition ? selon Bernard Croisile : 

« Pour être consolidé, un apprentissage doit être répété et son réapprentissage être espacé. C’est ainsi que, chez un bébé de trois mois, une réactivation une semaine après le premier apprentissage prolonge jusqu’à six semaines la rétention mnésique. Comme pour l’adulte, un intervalle de temps raisonnable doit être laissé entre les différents réapprentissages du nourrisson »

En effet, pour bénéficier pleinement des bienfaits de l’auto-relaxation respiratoire, il est nécessaire que les séances d’intégration de la méthode soient hebdomadaires et ce, durant un minimum de six semaines. Ensuite, l’essentiel de la mémorisation corporelle est effectuée. Reste bien sûr à l’entretenir par une pratique hebdomadaire, voire davantage si nécessaire, en cas d’un ressenti important de stress.

En outre, selon Bernard Croisile, le type de savoir-faire moteur utilisé dans l’auto-relaxation respiratoire  est dit : « à boucle fermée car chacun des éléments de l’action procure suffisamment d’indices pour la poursuivre : l’enchaînement se fait naturellement de façon quasi réflexe. Même si ces habiletés motrices sont initialement difficiles à maîtriser, elles résistent particulièrement bien au temps : nager, faire du vélo, du patin à roulettes, du roller »

Mais qu’en est-il sur le plan anatomique ? d’après Bernard Croisile :
« Notre mémoire enregistre trois types d’informations : des procédures gestuelles, des informations sensorielles et des informations émotionnelles. Il est donc logique de concevoir l’existence de trois systèmes anatomiques d’apprentissage : Tout d’abord, le cervelet et les régions profondes du cerveau (ganglions de base, le striatum et le thalamus). Ils interviennent dans le contrôle et l’automatisation des mouvements, alors que les régions des lobes pariétaux et frontaux sont cruciales pour la conservation et l’initiation des programmes des gestes. »

Cette mémoire, dite procédurale, est donc en jeu dans l’auto-relaxation respiratoire quand la concentration s’applique à choisir la partie du corps à détendre ainsi que l’ordre d’enchaînement avec celle qui la précède ou qui la suit.

« La seconde mémoire, celle du monde extérieur, est liée aux deux circuits de Papez ; chacun se trouve dans un hémisphère : celui de l’hémisphère gauche mémorise préférentiellement les informations véhiculées par le langage, c’est la mémoire verbale. »

C’est donc ce circuit qui est utilisé lors de la mémorisation du rythme et de la tonalité de ma voix en consultation ou en formation puis par la suite, de la voix intérieure de celui qui s’auto-relaxe.

« Celui de l’hémisphère droit est plus compétent pour mémoriser des informations visuospatiales telles que les dessins abstraits ou les itinéraires, c’est la mémoire visuelle. Ces deux circuits coopèrent, bien sûr, entre eux grâce à des connections inter-hémisphériques. »

Ainsi, c’est cette mémoire qui est employée lors de la visualisation des différentes parties du corps ou des organes (ex : l’itinéraire digestif, artériel et veineux). Chaque personne les voit mentalement de façon très spécifique grâce à sa symbolique personnelle.

« Enfin, le lieu de la mémoire émotionnelle, c’est l’amygdale, petite structure contigüe à l’hippocampe qui reçoit des informations sensorielles du cerveau (…) : elle est reliée aux régions du tronc cérébral où siège le système nerveux autonome dont le rôle est de contrôler le fonctionnement du cœur et des poumons. »

On voit donc très bien ici le lien concret existant entre les émotions et la respiration : les émotions agréables ressenties – notamment celle de gratitude - lors de l’auto-relaxation respiratoire sont toujours reliées à l’inspir et à l’expir ; il suffira ainsi, une fois cette mémoire émotionnelle de bien être régulièrement entraînée par la pratique, d’être simplement réactivée par quelques respirations profondes, avant un rendez-vous ou une échéance importante par exemple.

La mémoire est une compagne vraiment fascinante, n’est-ce pas ? Alors autant l’activer !

H. Monnet